Préserver la mémoire d’un lieu imprégné de mystères : un projet modeste mais exemplaire

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Le CAUE a été sollicité par la commune de Mouriez afin de valoriser l’histoire d’une ancienne construction, enclavée dans le cimetière communal de Mouriez. D’après des légendes urbaines, elle aurait eu un usage de "maison des plaidoiries". L’usage affecté à cette maison est incertain en réalité.

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Ce curieux bâtiment est tombé en désuétude, jusqu’à sa disparition. Au fil du temps, la nature a progressivement repris ses droits, en enveloppant cette construction d’une masse végétale évoquant une drôle de silhouette. Des archives pourront peut-être révéler, un jour, ce qui avait motivé la construction de cette maison isolée ?

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En 2017, ce bâtiment dégradé est malheureusement tombé en ruine, avant même que l’on ne trouve d’éventuelles ressources pour l’entretenir. Monsieur le Maire, étant sensible à ce lieu imprégné de mystères, a tenu à en préserver la mémoire. En 2019, la commune de Mouriez a alors sollicité l’aide du CAUE afin de trouver un moyen de valoriser ce lieu symbolique, en amont de toute maîtrise d’œuvre.

Un architecte du CAUE s’est donc rendu sur place pour retracer l’historique du lieu. Après quelques recherches, il est apparu que ce bâti était déjà représenté sur le cadastre Napoléonien de 1829 et l’emplacement de cette construction, de brique et de silex, figure toujours sur le plan cadastral actuel. Les échanges ont permis de jauger le potentiel de l’usage proposé par l’équipe municipale, en concertation avec les habitants. Le manque d’aménagements autour du monument aux morts (situé entre la maison des plaidoyers et l’église) a notamment été mis en évidence, afin que les cérémonies officielles soient plus accessibles.

 

Restitution des vestiges

Face à cette situation, il pourrait être tentant de "re-fabriquer" de l’histoire à partir des bribes d’informations disponibles, au risque de produire des reconstitutions hasardeuses et difficilement réversibles, que les architectes appellent péjorativement des "pastiches". A Mouriez, la prudence archéologique était plutôt de mise, et il fallait aussi faire preuve de sagesse, en évitant de créer une nouvelle construction dont l’utilité aurait été limitée.

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Le CAUE 62 a donc proposé d’étudier la possibilité de restituer uniquement les fondations, en s’inspirant d’autres réalisations réussies. Monsieur le Maire a ainsi pu présenter à son équipe municipale, à titre d’exemple, un aménagement réalisé à Lalonquette (64) pour un Musée en plein air. Là-bas, des vestiges antiques ont été modestement reconstitués en gabions de fil de fer rempli de pierres sèches, le tout à hauteur de banc seulement, créant ainsi un espace de rencontre appréciable et sensé, permettant de se projeter dans l’histoire du lieu.

Mouriez 6Suivant les recommandations du CAUE, la commune de Mouriez a donc fait disposer des gabions de manière à évoquer la partie basse des façades de la maison disparue. A l’endroit de l’ancienne porte d’entrée, un passage libre permet d’accéder à cet espace marqué par la pierre de seuil (qui a pu être replacée à son emplacement d’origine). Le maillage métallique des gabions a été recouvert d’un couvre mur en ardoise, rendant ces "casiers" de pierre plus confortables pour s’y assoir. L’aspect esthétique de l’ensemble est harmonieux avec son environnement, l’intervention est modeste (ce qui est cohérent par rapport au manque d’informations actuel) et le sol perméable est qualitatif. L’ardoise apporte une finition esthétique, qui n’est pas sans rappeler la toiture de l’église voisine.

A l’occasion de la fête communale, la restitution des vestiges de la maison des plaidoyers a été inaugurée le 11 novembre. Désormais, en s’inspirant de l’exemple de Lalonquette, le monument aux morts de Mouriez dispose tout à la fois d’un banc (appréciable entre autres au moment des cérémonies commémoratives) et d’une reconstitution permettant de préserver le souvenir de la maison des plaidoyers.

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Plus de précisions : article paru dans la Voix du Nord le 28 octobre 2019.